lundi 28 novembre 2011
samedi 26 novembre 2011
Elliott Murphy, concert le 2 décembre à Vergèze
Le blues qui rit d'Elliott Murphy
Elliott Murphy a tourné avec les grands du Blues: en première partie de John Lee Hooker aux USA, avec Albert King en France. Il a réalisé un disque entier d'hommages à Muddy Waters et à ses inspirateurs bluesmen (Elliott Murphy Gets Muddy). Pourtant, sa peau reste à jamais marquée par l'immersion dans l'univers de Lou Reed. Il se fondit dans la bande d'Andy Warhol. Les notes de pochette (liner notes) du vinyle Velvet Underground Live, en 1969, c'est lui («mon premier fait d'armes...»). Elliott épouse la marginalité du Rock froid, cru, radical, et poétique de l'auteur de Walk on the Wild Side.
Aujourd'hui, la double signature du blues et de l'underground grave le style de l'Américain de Manhattan, né en 1949. A l'époque, selon ses dires, «on me disait le plus européen de tous. Je ne le renie pas. J'étais attiré par la littérature européenne». D'ailleurs, l'héritier de la poésie Beat et de Jack Kerouac, que le roman d'Hemingway Paris est une fête subjugua, habite la capitale française depuis plus de vingt ans. Il mènerait une vie retirée... si ce n'était le Rock!
Devant moi, noyé dans le décor orange (nappe comprise) hyper-kitsch du restaurant Le Vieux Châtelet, on dirait Johnny Depp dans Pirate des Caraïbes (colliers, bagues, foulards, bandana bleu marine). Le regard est doux, le port serein, le verbe choisi. Les mains ne tremblent pas. Il parle français couramment.
Elliott raconte posément l'enregistrement du disque au Havre: onze de ses meilleures chansons (d'où le titre éponyme du CD sorti en mars). La production de son fils Gaspard, 20 ans, l'a épaté. Ce dernier dépoussière les arrangements. Eliott signe son 31ème disque mais peut se promener tranquille sur les trottoirs parisiens. Même si l'artiste représente une star pour de nombreux amateurs, pas besoin de lunettes noires.
Avec le guitariste Olivier Durand et le claviériste Kenny Margolis, le “Murph” signe un disque somptueux, imprégné de Blues. «Tout comme mon premier disque, marqué par les influence de Janis Joplin, Jim Morrison et BB King. Par la suite, je me suis entiché de la country: je l'ai également épousée. J'ai toutefois continué à appuyer ma musique sur deux pieds, l'intensité du blues-l'émotion du rock.» Dans le groove envoûtant, on identifie sans confusion possible le balancement du bluesman Jimmy Reed. Le parcours d'Elliott Murphy présente une autre référence: Bruce Springsteen. L'ami de toujours. Il invite Murphy sur scène chaque fois qu'il passe à Paris. La dernière fois, c'était au Parc des Princes, pour deux chansons, en 2008. Bruce a également envoyé un message au téléphone en direct pendant le concert du New Morning, pour lui souhaiter bon anniversaire, en 2009. Pour le disque, Murphy a logiquement sollicité la vocaliste de son pote, Lisa Lowell.
La tournée qu'il amorce (lancement au New Morning les 18 et 19 mars) permettra au public de savourer les classiques Gone, Gone, Train Kept Rollin, Rain Rain Rain, Rock'n roll n' Rock'n roll. Sans oublier l'enivrant Poison n'Grace, au refrain accrocheur. Les paroles décrivent les vibrations des villes de l'intérieur, les paysages urbains avec des sentiments. Les textes sont très "écrits". Littéraire de haut en bas (il a publié deux romans), le "Murph" revendique deux ressorts: «le rock, ma drogue; ma religion, les mots. Je confie mon destin dans les mots».
Sentant le bon client, il sert l'aphorisme qui tue: «Si vous jouez un blues à l'envers, vous sortez de prison, votre femme revient, et vous retrouvez un boulot!» Holaaaaa! Ça le fait ! J'ai déjà produit mon effet à plusieurs reprises en société avec la formule. Mais pour le coeur, les blues à l'endroit d'Elliott me suffisent largement.
Bruno Pfeiffer
Photos : Anne Lenormand pour Libération
CD
Elliott Murphy – Label Last Call/WAGRAM
Extrait de Libération sur Elliott Murphy, pour vous mettre dans la bonne ambiance pour le concert de Murphy le vendredi 2 décembre à Vergèze
vendredi 25 novembre 2011
Décès du batteur Paul Motian à l'âge de 80 ans (article en français)
Paul Motian nous a quittés
Nous avons appris avec émoi la mort de Paul Motian mardi 22 novembre 2011, des suites d’une maladie du sang et de la moelle osseuse. Il avait 80 ans. Nos pensées vont à sa soeur, Sarah McGuirl, ainsi qu’à ses proches.
Né en 1931 à Philadelphie sous le nom de Steven Paul Motian, ce batteur d’origine arménienne a grandi à Providence, New Jersey. Son instrument a d’abord été la guitare, en raison de son goût pour les musiques populaires modernes et pour les musiques traditionnelles grecques et turques. C’est à douze ans qu’il commence à jouer de la batterie dans divers orchestres scolaires. A quinze ans, il découvre le jazz et écume les concerts de la ville avant de partir en tournée en Nouvelle-Angleterre. C’est dans cet élan musical intense qu’il forme son oreille et son jeu, en accordant une attention toute particulière à Charlie Parker, Dizzy Gillespie, Bud Powell et Max Roach.
C’est avec le Bill Evans Trio que Paul Motian se fera un nom. Jusqu’à la mort de Scott LaFaro en 1961, tous trois enregistreront quelques classiques indémodables où il fait déjà entendre son jeu unique. Chuck Israels puis Gary Peacock remplaceront LaFaro, mais la magie ne sera plus la même : Motian quitte le trio en 1963 pour rejoindre Paul Bley. Si leur collaboration est courte (un an environ), Motian ne cessera de dire combien Bley lui aura ouvert de nouvelles perspectives et incité à se dégager des formes fixes. Sous son impulsion, il fréquente quelques jazzmen peu orthodoxes, tels qu’Albert Ayler, Don Cherry, Pharoah Sanders et Mose Allison.
En 1966, il intègre son second grand groupe, le quartet de Keith Jarrett, au sein duquel il officie jusqu’en 1977 aux côtés de Charlie Haden et Dewey Redman. Les labels Atlantic, Impulse ! et ECM illustrent abondamment leurs échanges musicaux.
Motian attendra 1972 pour entreprendre une carrière de leader. Décidé à ne pas s’en tenir au strict domaine de la percussion, il achète un piano à Keith Jarrett et étudie donc la composition. Conception Vessel paraît cette même année chez ECM, suivi de Tribute en 1974 chez Pinnacle. Ces disques réunissent standards et originaux qu’il a composés au piano. A partir de Dance (1977), il a un groupe régulier comportant Joe Lovano au saxophone (il jouera très souvent avec lui par la suite). Il jouera également avec Bill Frisell à partir de 1980, les deux musiciens accordant avec une osmose rare leurs jeux aériens, tout en continuant d’enregistrer pour Soul note, ECM et JMT et d’accompagner divers musiciens à la batterie, tels que Geri Allen, Masabumi Kikuchi, Marilyn Crispell ou Enrico Pieranunzi.
Au cours des années 2000, lassé par le rythme des tournées, il décide de ne plus quitter New York. Cela ne semblera pas affecter sa créativité puisque, tout récemment encore, il restait très actif sur la scène du Village Vanguard.
Que dire enfin du jeu de Motian ? Sa signature était l’une des plus singulières du jazz moderne. Déployant des trésors infinis de nuances, il a su retourner un à un tous les présupposés de la batterie pour en faire un instrument-caméléon. Il en jouait comme d’un instrument mélodique tout en maintenant une pulsation rampante. Il savait comme nul autre déplacer les repères de l’auditeur et intervertir les rôles des musiciens au sein de ses différents groupes. A l’aide d’un vocabulaire qu’il voulait délibérément raréfié, il a su développer un langage d’une rare ingéniosité où un coup de balai tient à la fois un rôle rythmique et atmosphérique, où la cymbale se veut une couleur autant qu’un accent. Sa grosse caisse elle-même, accordée très bas, n’avait jamais frontalement un rôle rythmique.
On dit souvent, en assumant le cliché, que la musique transcende les mots, qu’elle ne se laisse pas verbaliser. Si la formule contient une part de vérité, Motian l’a peut-être incarnée mieux que tout autre : son style, économe et élégant, tient de l’énigme absolue et a donné une troublante intensité au mot d’ordre « less is more ».
Né en 1931 à Philadelphie sous le nom de Steven Paul Motian, ce batteur d’origine arménienne a grandi à Providence, New Jersey. Son instrument a d’abord été la guitare, en raison de son goût pour les musiques populaires modernes et pour les musiques traditionnelles grecques et turques. C’est à douze ans qu’il commence à jouer de la batterie dans divers orchestres scolaires. A quinze ans, il découvre le jazz et écume les concerts de la ville avant de partir en tournée en Nouvelle-Angleterre. C’est dans cet élan musical intense qu’il forme son oreille et son jeu, en accordant une attention toute particulière à Charlie Parker, Dizzy Gillespie, Bud Powell et Max Roach.
- Paul Motian © H. Collon/Objectif Jazz
C’est avec le Bill Evans Trio que Paul Motian se fera un nom. Jusqu’à la mort de Scott LaFaro en 1961, tous trois enregistreront quelques classiques indémodables où il fait déjà entendre son jeu unique. Chuck Israels puis Gary Peacock remplaceront LaFaro, mais la magie ne sera plus la même : Motian quitte le trio en 1963 pour rejoindre Paul Bley. Si leur collaboration est courte (un an environ), Motian ne cessera de dire combien Bley lui aura ouvert de nouvelles perspectives et incité à se dégager des formes fixes. Sous son impulsion, il fréquente quelques jazzmen peu orthodoxes, tels qu’Albert Ayler, Don Cherry, Pharoah Sanders et Mose Allison.
En 1966, il intègre son second grand groupe, le quartet de Keith Jarrett, au sein duquel il officie jusqu’en 1977 aux côtés de Charlie Haden et Dewey Redman. Les labels Atlantic, Impulse ! et ECM illustrent abondamment leurs échanges musicaux.
Motian attendra 1972 pour entreprendre une carrière de leader. Décidé à ne pas s’en tenir au strict domaine de la percussion, il achète un piano à Keith Jarrett et étudie donc la composition. Conception Vessel paraît cette même année chez ECM, suivi de Tribute en 1974 chez Pinnacle. Ces disques réunissent standards et originaux qu’il a composés au piano. A partir de Dance (1977), il a un groupe régulier comportant Joe Lovano au saxophone (il jouera très souvent avec lui par la suite). Il jouera également avec Bill Frisell à partir de 1980, les deux musiciens accordant avec une osmose rare leurs jeux aériens, tout en continuant d’enregistrer pour Soul note, ECM et JMT et d’accompagner divers musiciens à la batterie, tels que Geri Allen, Masabumi Kikuchi, Marilyn Crispell ou Enrico Pieranunzi.
- Paul Motian © H. Collon/Objectif Jazz
Au cours des années 2000, lassé par le rythme des tournées, il décide de ne plus quitter New York. Cela ne semblera pas affecter sa créativité puisque, tout récemment encore, il restait très actif sur la scène du Village Vanguard.
Que dire enfin du jeu de Motian ? Sa signature était l’une des plus singulières du jazz moderne. Déployant des trésors infinis de nuances, il a su retourner un à un tous les présupposés de la batterie pour en faire un instrument-caméléon. Il en jouait comme d’un instrument mélodique tout en maintenant une pulsation rampante. Il savait comme nul autre déplacer les repères de l’auditeur et intervertir les rôles des musiciens au sein de ses différents groupes. A l’aide d’un vocabulaire qu’il voulait délibérément raréfié, il a su développer un langage d’une rare ingéniosité où un coup de balai tient à la fois un rôle rythmique et atmosphérique, où la cymbale se veut une couleur autant qu’un accent. Sa grosse caisse elle-même, accordée très bas, n’avait jamais frontalement un rôle rythmique.
On dit souvent, en assumant le cliché, que la musique transcende les mots, qu’elle ne se laisse pas verbaliser. Si la formule contient une part de vérité, Motian l’a peut-être incarnée mieux que tout autre : son style, économe et élégant, tient de l’énigme absolue et a donné une troublante intensité au mot d’ordre « less is more ».
par Mathias Kusnierz // Publié le 24 novembre 2011
Article mis dans Citizen Jazz du 24 novembre
mercredi 23 novembre 2011
Les résidences de "Jazz en L'R" 2012
Les résidences de « Jazz en l’R » 2012
Le collectif Jazz en L’R, soutenu en grande partie par la région Languedoc-Roussillon, à retenu trois groupes pour ses résidences 2012 (dix jours de répétitions et au moins trois concerts dans la région, organisés par les diffuseurs du collectif : Le Théâtre de Sète, Jazz à Junas et Jazzèbre).
Les projets élus (dont les porteurs doivent résider dans la région) parmi les quatorze présentés :
Impérial quartet avec Gérald Chevillon (sax), Joachim Florent (cb), Damien Sabatier (sax) et Antonin Leymarie (bat).
Solo pour trois avec Guillaume Séguron (cb), Patrice Soleti (guit) et Lionel Garcin (sax).
Rue Trivalle avec "Pierre Diaz (sax) et Laurent Cavalié (chant, acc).
Les projets élus (dont les porteurs doivent résider dans la région) parmi les quatorze présentés :
par Frank Bigotte
http://www.citizenjazz.com/Les-residences-de-Jazz-en-l-R-2012.html
Décès du batteur Paul Motian à l'âge de 80 ans
Article dans l'International Herald Tribune de mercredi 23 novembre
Paul Motian, Jazz Drummer, Is Dead at 80
By BEN RATLIFF
Published: November 22, 2011 Tumblr
Paul Motian, a drummer, bandleader, composer and one of the most influential jazz musicians of the last 50 years, died on Tuesday in Manhattan. He was 80 and lived in Manhattan.
The cause was complications of myelodysplastic syndrome, a blood and bone-marrow disorder, said his niece, Cindy McGuirl. Mr. Motian was a link to groups of the past that informed what jazz sounds like today. He had been in the pianist Bill Evans’s great trio of the late 1950s and early 1960s and in Keith Jarrett’s so-called American quartet during the 1970s. But it was in the second half of his life that Mr. Motian found himself as a composer and bandleader, with work that could be counterintuitive or straightforward, runic or crowd-pleasing.
Stylish and alert — he wore sunglasses in the dark and laughed often and loudly — he worked steadily for decades, and for the last six years or so almost entirely in Manhattan. He had the support of the record producers Stefan Winter and Manfred Eicher, who released his music on the labels Winter & Winter and ECM, and of Lorraine Gordon, the proprietor and presiding spirit of the Village Vanguard, who booked him many times a year, either in his own groups or those of others. (In his 70s he grew tired of traveling, and anyway, he said, he preferred the sound of his drum kit at the Vanguard.)
The many musicians he played with regularly included the saxophonist Joe Lovano and the guitarist Bill Frisell, with whom he had a working trio; the pianist Masabumi Kikuchi; the saxophonists Greg Osby, Chris Potter and Mark Turner, with whom he played in trios and quartets; the members of the Electric Bebop Band, with multiple electric guitars, which in 2006 became the Paul Motian Band; and dozens of others, from developing players to old masters.
For nearly all of his bands, his repertory was a combination of terse and mysterious originals he composed at the piano, American-songbook standards and music from the bebop tradition of his youth by the likes of Bud Powell, Thelonious Monk, Charlie Parker and Charles Mingus.
Stephen Paul Motian (he pronounced his surname, which was Armenian, like the word “motion”) was born in Philadelphia on March 25, 1931, and reared in Providence, R.I. In 1950 he entered the Navy. After briefly attending its music school in Washington, he sailed around the Mediterranean until 1953, when he was stationed in Brooklyn. He was discharged a year later.
He met Evans in 1955, and by the end of the decade he was working in a trio with him and the bassist Scott LaFaro. That group, in which the bass and drums interacted with the piano as equals, continues to serve as an important source of modern piano-trio jazz.
In the late 1950s and early 1960s Mr. Motian played with many other bandleaders, including Lee Konitz, Warne Marsh, Mose Allison, Tony Scott, Stan Getz, Johnny Griffin and, for a week, Monk. After leaving his partnership with Evans, he worked steadily with the pianist Paul Bley, whom he often credited with opening him up to greater possibilities.
“All of a sudden there was no restrictions, not even any form,” he told the writer and drummer Chuck Braman in 1996. “It was completely free, almost chaotic.”
In an interview on Tuesday, Mr. Bley recalled: “We shared the same philosophy, musically. He knew that what he was doing in the past was not his answer. What he lived for was growth and change.”
Then, and even more with Mr. Jarrett’s quartet in the 1970s, Mr. Motian moved away from swing-based rhythm; he improvised freely, or played off melodic form. Eager to grow beyond percussion, he studied and composed on a piano he had bought from Mr. Jarrett, and in 1973 he made a record of his own compositions for ECM, “Conception Vessel,” with Mr. Jarrett and others. One of the last records he made with Mr. Jarrett’s quartet, “Byablue” (1977), consisted mostly of Motian originals.
But the old sense of swing never left, and it later became abundantly clear again, whether he was playing an original sketch built on uneven phrasing with gaps of silence or a root text of jazz like “Body and Soul.” Sometimes he would strip a beat to absolute basics, the sound of brushes on a dark-toned ride cymbal and the abrupt thump of his low-tuned kick drum. Generally, a listener could locate the form, even when Mr. Motian didn’t state it explicitly.
“With Paul, there was always that ground rhythm, that ancient jazz beat lurking in the background,” said the pianist Ethan Iverson, one of the younger bandleaders who played with and learned from him toward the end.
Mr. Motian’s final week at the Vanguard was with Mr. Osby and Mr. Kikuchi, in September. “He was an economist: every note and phrase and utterance counted,” Mr. Osby said on Tuesday. “There was nothing disposable.”
He is survived by his sister, Sarah McGuirl.
lundi 21 novembre 2011
La Femme est l'Avenir du Jazz
FEMMES DE JAZZ
Article trouvé dans les Allumés du Jazz de Février 2011
Parallèlement au déferle- ment régulier de chan- teuses dans les bacs de ce qui subsiste de rayons jazz, on assiste à l'apparition tout aussi régulière de musiciennes accé- dant à une réelle notoriété. Le relais médiatique du phéno- mène par les revues spécialisées (ou non) laisse ainsi penser que, addition faite des vocalistes et des instrumentistes, le jazz se féminise.
Or, c'est un fait, qu'un sur vol de la littérature, des dic- tionnaires et autres encyclopé- dies qui jalonnent l'histoire du jazz, prouve à l'évidence qu'à l'exception de quelques grandes voix le panthéon du jazz n'affiche qu'une très pauvre représentation féminine.
En témoigne aussi la récente antho- logie « Les Géants du Jazz », pro- posée à ses lecteurs par le jour- nal Le Monde : sur quarante élus, quatre chanteuses (Bessie Smith, Billie Holiday, Ella Fitzgerald, Sarah Vaughan). A ce niveau (les grands, les incon- tournables), la seule absence d'une Mary Lou Williams est proprement scandaleuse et montre bien comment, au fil du temps, silence et indifférence se sont ligués pour conser ver au jazz sa suprématie masculine. Il suffit pourtant de remonter honnêtement le temps jusqu'aux plus lointaines origines du jazz pour y rencontrer nombre d'es- timables et talentueuses instru- mentistes. Suivez le guide...
Hardin Armstrong. Les divers témoignages les concernant font état de caractères bien trempés dans la mesure où, outre la difficulté à s'intégrer à un milieu d'hommes, ces femmes-là étaient généralement désavouées par leurs familles pour manque évident de respec- tabilité.
Il n'était pas rare pourtant que le jazz se joue en famille : Irma, soeur aînée de Lester Young jouait du saxophone avec ses frères ; tout comme Léontine (piano) et Marjorie (saxo- phone) Pettiford ; ou encore Norma Teagarden (piano).
Progressivement, et la crise économique n'arrange pas les choses, les musiciennes sont partagées entre faire de la musique et gagner de l'argent. Elles deviennent une concur- rence pour les musiciens. Dans ce contexte, la ségrégation noir/blanc se double de celle homme/femme. C'est ainsi que Blanche Calloway est délaissée, au profit de son frère Cab, par Ir ving Mills alors impresario du Cotton Club. Elle constituera cependant un orchestre remar- quable avec des musiciens comme Ben Webster, Vic Dickenson, Clyde Hart et Cozy Cole, mais le succès restera moindre.
A noter que le développement de ces orchestres de femmes ne se fait pas sans débat. Un cri- tique écrit dans la revue Down Beat que les femmes ne dispo- sent pas d'un certain nombre de qualités indispensables au jazz, notamment qu'elles ne swin- guent pas. Ce qui lui vaut quelques répliques cinglantes de musiciennes dans le numéro suivant.
Au-delà de ces difficultés, un certain nombre d'orchestres de femmes connaissent leur part de succès : celui d'Ina Ray
Hutton « and his Melodears » (musiciennes blanches), les « Harlem Playgirls » (musiciennes noires) et, surtout, «The International Sweethearts of Rhythm », sans doute le meilleur. Il doit beau- coup au talent d'arrangeuse de la trompettiste Edna Williams, puis à Anna Mae Winburn qui lui succède à la tête de la forma- tion et bénéficie des arrange- ments de Eddie Durham. L'orchestre, mixte au plan racial, connaîtra de sérieux pro- blèmes lors de ses déplacements dans le Sud mais se produira jusqu'en 1948, époque où, comme l'ensemble des grands orchestres, les Sweethearts subissent le changement de mode et le contrecoup de la fin de la guerre au plan écono- mique.
De ces ensembles féminins émergent quelques personnali- tés solistes : Dolly Jones, Ernestin « Tiny » Davis, Estella Slavin, Valaida Snow (« Queen of the trumpet »), Jane Sager (trompette) ; Irma Young, L'Ana Webster, Viola Burnside (saxophone) ; Edythe Turham, Mar y Colston Kirk, Doris Peavey (piano).
De ces années d'après-guerre, on se doit de retenir quelques autres pianistes exception- nelles. D'abord, toujours en activité, Marian McPartland et Barbara Carroll. Puis aussi Jutta Hipp (3 albums sur Blue Note), Lorraine Geller, Bertha Hope et
Pat Moran. Sur les autres instruments se
sont distinguées : Norma Carson, Jean Starr, Clora Bryant (trom- pette) ; Willene Barton, Kathleen Stobart, Vi Redd (saxophone) ; Melba Liston (trombone) ; Marjorie Hyams, Terry Pollard (vibraphone) ; Mary Osborne (guitare) ; Corky Hale, Dorothy Ashby (harpe) ; Vivian Garry, June Rotenberc, Lucile Dixon (contrebasse) ; Bridget O'Flynn, Rose Gottesman, Elaine Leighton (batterie).
La fin de la seconde guerre mondiale renvoie les femmes au foyer et aux tâches domes- tiques. Nombre de musiciennes se « sacrifient » pour élever les enfants et stoppent leur car- rière. Certaines choisissent de la poursuivre et, pour pallier à l'in- suffisance de sollicitations de la part de leurs confrères mâles, renouent avec l'alternative des orchestres de femmes. Mais cette fois, plutôt en petites for- mations. C'est le cas de Vi Burnside, Flo Dreyer et de Beryl Booker qui joue, sur la 52ème Rue à New York, avec un excel- lent trio complété par Bonnie Wetzel (contrebasse) et Elaine Leighton (batterie). Mary Lou Williams dirige ses « Girls Stars » avec notamment Marjorie Hyams (vibraphone) et Mary Osborne (guitare). Marian McPartland et Vi Redd font de même.
Mais ces tentatives restent marginales et, trop souvent pour les musiciennes, à qualités égales, la notoriété reste moin- dre. Critique bien connu, Leonard Feather produit en 1954 une séance pour le label MGM qu'il intitule « Cats vs Chicks, a jazz battle of the sexes » et qui oppose (et mêle, pour une face) deux septettes : celui de Clark Terry (Lucky Thompson, Urbie Green, Horace Silver, Tal Farlow, Percy Heath, Kenny Clarke) et celui de Terry Pollard (Norma Carson, Corky Hale, Ber yl Booker, Mar y Osborne, Bonnie Wetzel, Elaine Leighton). La proposition est limite bon goût (hommes contre femmes) et il faut atten- dre 1958 pour que, toujours dans Down Beat, un autre cri- tique (Barry Ulanov) pose la question du jugement des musi- ciennes en fonction de leurs qualités musicales et non de leur sexe. Rejoignant ainsi une déclaration de Mar y Lou Williams : « vous devez jouer, c'est tout. Ils ne doivent pas penser à vous comme à une femme si vous jouez vraiment ».
Les plus en vue restent les pia- nistes : Patti Bown (pianiste de Quincy Jones durant les années soixante, jouée par Count Basie, J.J. Johnson), Alice McLeod Coltrane (remarquée chez Terry Gibbs avant son mariage avec John Coltrane), Valérie Capers (pianiste aveugle, disques rares sur le label Atlantic), Joanne Brackeen (joue et enregistre avec Joe Henderson, Stan Getz), Jessica Williams (pianiste attitrée du « Keystone Korner » de San Francisco à la fin des années soixante-dix, abondante et remar- quable discographie). Pianistes encore, mais surtout chef d'or- chestres, Carla Bley et Toshiko Akiyoshi ont su progressive- ment imposer leur musique.
Sur d'autres instruments se singularisent les organistes Shirley Scott (nombreux albums sur les labels Prestige et BlueNote), Rhoda Scott et Barbara Dennerlein ; les saxo- phonistes Barbara Donald, Jane Bunnett, Virginie Mayhew et Jane Ira Bloom (méconnue alors qu'elle est une des rares spécialiste, originale, du soprano) ; la tromboniste Janice Robinson (active au sein des orchestres de Thad Jones/Mel Lewis, Clark Terry et Gil Evans, elle co-dirige un quintet avec la corniste Sharon Freeman), Lindsay Cooper (hautbois, basson) ; les guitaristes Emily Remler, Monette Sudler et Leni Stern; les flûtistes Holly Hoffmann et Ali Ryerson ; les percussionnistes Cindy Blackman, Terry Lynne Carrington et Marilyn Mazur. La plupart d'entre elles sont, aujourd'hui encore, en activité.
augmentation et, de plus en plus, sur tous les instruments. Parallèlement, le mouvement vers une plus grande reconnais- sance des strictes qualités créa- tives des musiciennes de jazz se concrétise par une écoute un petit peu moins machiste et un jugement de valeur de plus en plus en lien avec le projet musi- cal proposé. Ce qui devrait d'ail- leurs être la seule règle et non une affaire de sexe (ou de mar- keting). Pas plus que de couleur de peau.
Moyennant quoi, la scène contemporaine du jazz et des musiques improvisées nous offre un nombre conséquent d'instrumentistes de talent dont il serait parfaitement idiot de se priver. Et puis cela présente l'avantage de rompre avec la tendance globalisante actuelle du marché qui cristallise sur une dizaine de noms la repré- sentativité totale du champ du jazz. Osons la diversité, bien plus riche que l'uniformité, la curiosité reste la source la plus sûre du bonheur de la décou- verte (non prescrite).
A écouter donc (liste non exhaustive) : Sophie Agnel, Lynne Aryale, Sylvie Courvoisier, Marilyn Crispell, Sophia Domancich, Bettina Kee, Nathalie Loriers, Perrine Mansuy, Rita Marcotuli, Myra Melford, Amina Claudine Myers, Junko Onishi, Michèle Rosewoman, Renée Rosnes, Ellyn Rucker, Irene Schweizer, Aki Takase, Christine Wodrascka, Rachel Z (piano) ; Myriam Alter, Carine Bonnefoy, Maria Schneider, Magali Souriau, Sylvia Versini (composition, chef d'or- chestres) ; Airelle Besson, Laurie Frink, Ingrid Jensen (trompette) ; Sophie Alour, Lisa Cat-Berro, Claire Daly, Alexandra Grimal, Christine Jensen, Géraldine Laurent, Jessica Lurie, Véronique Magdelenat, Tineke Postma, Maguelonne Vidal (saxophones) ; Regina Carter, Deborah Seffer (violon) ; Irene Aebi, Peggy Lee, Diedre Murray(violoncelle): Dominique Bouzon, Gail Thompson(flûte) ; Loren Mazzacane Connors, Mary Halvorson (gui- tare) ; Hélène Labarrière, Joëlle Léandre, Sarah Murcia, Giulia Valle (contrebasse) ; Béatrice Graf, Susie Ibarra, Sherrie Maricle, Anne Paceo, Micheline Pelzer, Julie Saur y (batterie) ; Hélène Breschand, Isabelle Ollivier (harpe).
Et que les oubliées veuillent bien me pardonner. Comme Jean Ferrat, je proclame avec le poète, que la femme est l'avenir du jazz.
http://www.allumesdujazz.com/Journal/articles/FEMMES_DE_JAZZ_37
PETITE HISTOIRE DES FEMMES (INSTRUMEN- TISTES) DANS LE JAZZ
Parallèlement au déferle- ment régulier de chan- teuses dans les bacs de ce qui subsiste de rayons jazz, on assiste à l'apparition tout aussi régulière de musiciennes accé- dant à une réelle notoriété. Le relais médiatique du phéno- mène par les revues spécialisées (ou non) laisse ainsi penser que, addition faite des vocalistes et des instrumentistes, le jazz se féminise.
Or, c'est un fait, qu'un sur vol de la littérature, des dic- tionnaires et autres encyclopé- dies qui jalonnent l'histoire du jazz, prouve à l'évidence qu'à l'exception de quelques grandes voix le panthéon du jazz n'affiche qu'une très pauvre représentation féminine.
En témoigne aussi la récente antho- logie « Les Géants du Jazz », pro- posée à ses lecteurs par le jour- nal Le Monde : sur quarante élus, quatre chanteuses (Bessie Smith, Billie Holiday, Ella Fitzgerald, Sarah Vaughan). A ce niveau (les grands, les incon- tournables), la seule absence d'une Mary Lou Williams est proprement scandaleuse et montre bien comment, au fil du temps, silence et indifférence se sont ligués pour conser ver au jazz sa suprématie masculine. Il suffit pourtant de remonter honnêtement le temps jusqu'aux plus lointaines origines du jazz pour y rencontrer nombre d'es- timables et talentueuses instru- mentistes. Suivez le guide...
LES PIONNIÈRES
S'il est vrai que c'est au travers du chant (berceuses pour les enfants, chants religieux à l'église, chants de travail dans les plantations) que la musique est portée, dès la fin du XIX ème siècle, par les femmes noires et esclaves, c'est avec l'investisse- ment du « minstrel » par les Noirs qu'apparaissent les pre- mières instrumentistes (violon, banjo, tambourin). Dès les débuts du jazz à La Nouvelle- Orléans sont évoquées les per- sonnalités de Mamie Desdoumes, pianiste et chanteuse de blues, ainsi que d'Antonia Gonzales qui jouait du cornet. Mais les premières musiciennes à émer- ger sont des pianistes : Emma Barrett (la première à enregis- trer, avec Papa Celestin), Jeannette Salvant Kimball, Billie Pierce (aux côtés de Bessie smith, d'Alphonse Picou), Dolly Adams, Lovie Austin (chef d'or- chestre et arrangeuse), Cléo Brown, Dorothy Donegan et LilHardin Armstrong. Les divers témoignages les concernant font état de caractères bien trempés dans la mesure où, outre la difficulté à s'intégrer à un milieu d'hommes, ces femmes-là étaient généralement désavouées par leurs familles pour manque évident de respec- tabilité.
Il n'était pas rare pourtant que le jazz se joue en famille : Irma, soeur aînée de Lester Young jouait du saxophone avec ses frères ; tout comme Léontine (piano) et Marjorie (saxo- phone) Pettiford ; ou encore Norma Teagarden (piano).
LA SWING ERA ET LES ORCHESTRES DE FEMMES
Avec la « swing era » et dans les années qui précèdent la grande dépression (1930) va se développer un grand nombre d'orchestres entièrement fémi- nins. Ils se produisent dans les théâtres, les dancings et sont, pour la plupart, dévolus à la danse. Si leurs qualités musi- cales sont indéniables, il n'est pas certain qu'elles soient le seul critère de leur engage- ment. Les employeurs y voient un côté attractif et tiennent lar- gement compte du physique des musiciennes (cf. le film de Billy Wilder, Some Like It Hot).Progressivement, et la crise économique n'arrange pas les choses, les musiciennes sont partagées entre faire de la musique et gagner de l'argent. Elles deviennent une concur- rence pour les musiciens. Dans ce contexte, la ségrégation noir/blanc se double de celle homme/femme. C'est ainsi que Blanche Calloway est délaissée, au profit de son frère Cab, par Ir ving Mills alors impresario du Cotton Club. Elle constituera cependant un orchestre remar- quable avec des musiciens comme Ben Webster, Vic Dickenson, Clyde Hart et Cozy Cole, mais le succès restera moindre.
A noter que le développement de ces orchestres de femmes ne se fait pas sans débat. Un cri- tique écrit dans la revue Down Beat que les femmes ne dispo- sent pas d'un certain nombre de qualités indispensables au jazz, notamment qu'elles ne swin- guent pas. Ce qui lui vaut quelques répliques cinglantes de musiciennes dans le numéro suivant.
Au-delà de ces difficultés, un certain nombre d'orchestres de femmes connaissent leur part de succès : celui d'Ina Ray
Hutton « and his Melodears » (musiciennes blanches), les « Harlem Playgirls » (musiciennes noires) et, surtout, «The International Sweethearts of Rhythm », sans doute le meilleur. Il doit beau- coup au talent d'arrangeuse de la trompettiste Edna Williams, puis à Anna Mae Winburn qui lui succède à la tête de la forma- tion et bénéficie des arrange- ments de Eddie Durham. L'orchestre, mixte au plan racial, connaîtra de sérieux pro- blèmes lors de ses déplacements dans le Sud mais se produira jusqu'en 1948, époque où, comme l'ensemble des grands orchestres, les Sweethearts subissent le changement de mode et le contrecoup de la fin de la guerre au plan écono- mique.
De ces ensembles féminins émergent quelques personnali- tés solistes : Dolly Jones, Ernestin « Tiny » Davis, Estella Slavin, Valaida Snow (« Queen of the trumpet »), Jane Sager (trompette) ; Irma Young, L'Ana Webster, Viola Burnside (saxophone) ; Edythe Turham, Mar y Colston Kirk, Doris Peavey (piano).
DE L'APRÈS-GUERRE AUX SIXTIES
Avec l'avènement du « be bop » une nouvelle génération de musiciennes se manifeste. A ce stade, il convient de s'attarder sur l'une des figures essentielles de ce survol de l'histoire du jazz au féminin : Mary Lou Williams. Depuis l'enregistrement de son solo de piano (Night Life, 1930) et sa participation active à l'orchestre d'Andy Kirk (les « Twelve Clouds of Joy », dont elle signe les plus beaux arrangements), elle bénéficie du plus grand respect des musi- ciens (Duke Ellington) et en particulier des jeunes boppers (Thelonious Monk, Dizzy Gillespie, Herbie Nichols). Attentive à toutes les évolutions du jazz, qu'elle encourage, elle n'hésitera pas (en 1977) à se produire aux côtés de Cecil Taylor. Musicienne de tout pre- mier plan, égale des plus grands, elle aurait eu 100 ans cette année (comme Django!). Son écoute est indispensable et pas seulement dans la perspec- tive de réévaluation de cet arti- cle.De ces années d'après-guerre, on se doit de retenir quelques autres pianistes exception- nelles. D'abord, toujours en activité, Marian McPartland et Barbara Carroll. Puis aussi Jutta Hipp (3 albums sur Blue Note), Lorraine Geller, Bertha Hope et
Pat Moran. Sur les autres instruments se
sont distinguées : Norma Carson, Jean Starr, Clora Bryant (trom- pette) ; Willene Barton, Kathleen Stobart, Vi Redd (saxophone) ; Melba Liston (trombone) ; Marjorie Hyams, Terry Pollard (vibraphone) ; Mary Osborne (guitare) ; Corky Hale, Dorothy Ashby (harpe) ; Vivian Garry, June Rotenberc, Lucile Dixon (contrebasse) ; Bridget O'Flynn, Rose Gottesman, Elaine Leighton (batterie).
La fin de la seconde guerre mondiale renvoie les femmes au foyer et aux tâches domes- tiques. Nombre de musiciennes se « sacrifient » pour élever les enfants et stoppent leur car- rière. Certaines choisissent de la poursuivre et, pour pallier à l'in- suffisance de sollicitations de la part de leurs confrères mâles, renouent avec l'alternative des orchestres de femmes. Mais cette fois, plutôt en petites for- mations. C'est le cas de Vi Burnside, Flo Dreyer et de Beryl Booker qui joue, sur la 52ème Rue à New York, avec un excel- lent trio complété par Bonnie Wetzel (contrebasse) et Elaine Leighton (batterie). Mary Lou Williams dirige ses « Girls Stars » avec notamment Marjorie Hyams (vibraphone) et Mary Osborne (guitare). Marian McPartland et Vi Redd font de même.
Mais ces tentatives restent marginales et, trop souvent pour les musiciennes, à qualités égales, la notoriété reste moin- dre. Critique bien connu, Leonard Feather produit en 1954 une séance pour le label MGM qu'il intitule « Cats vs Chicks, a jazz battle of the sexes » et qui oppose (et mêle, pour une face) deux septettes : celui de Clark Terry (Lucky Thompson, Urbie Green, Horace Silver, Tal Farlow, Percy Heath, Kenny Clarke) et celui de Terry Pollard (Norma Carson, Corky Hale, Ber yl Booker, Mar y Osborne, Bonnie Wetzel, Elaine Leighton). La proposition est limite bon goût (hommes contre femmes) et il faut atten- dre 1958 pour que, toujours dans Down Beat, un autre cri- tique (Barry Ulanov) pose la question du jugement des musi- ciennes en fonction de leurs qualités musicales et non de leur sexe. Rejoignant ainsi une déclaration de Mar y Lou Williams : « vous devez jouer, c'est tout. Ils ne doivent pas penser à vous comme à une femme si vous jouez vraiment ».
EN ROUTEVERSL'ÉGALITÉ, DE LA FRATERNITÉ À LA COMMUNAUTÉ (1960-1990)
Les musiciennes qui ont émergé depuis les années soixante présentent une grande diversité de styles et d'ap- proches. Certaines vont utiliser et accompagner la montée en puissance du féminisme et des mouvements de libération de la femme. D'autres prennent en charge l'organisation de festi- vals ou de concerts, investissent les lieux dévolus aux musiciens. Davantage que dans le passé, elles vont faire leur place au sein de diverses formations grâce à leurs seules qualités musicales et acquérir une plus large reconnaissance, même si les résistances restent très importantes.Les plus en vue restent les pia- nistes : Patti Bown (pianiste de Quincy Jones durant les années soixante, jouée par Count Basie, J.J. Johnson), Alice McLeod Coltrane (remarquée chez Terry Gibbs avant son mariage avec John Coltrane), Valérie Capers (pianiste aveugle, disques rares sur le label Atlantic), Joanne Brackeen (joue et enregistre avec Joe Henderson, Stan Getz), Jessica Williams (pianiste attitrée du « Keystone Korner » de San Francisco à la fin des années soixante-dix, abondante et remar- quable discographie). Pianistes encore, mais surtout chef d'or- chestres, Carla Bley et Toshiko Akiyoshi ont su progressive- ment imposer leur musique.
Sur d'autres instruments se singularisent les organistes Shirley Scott (nombreux albums sur les labels Prestige et BlueNote), Rhoda Scott et Barbara Dennerlein ; les saxo- phonistes Barbara Donald, Jane Bunnett, Virginie Mayhew et Jane Ira Bloom (méconnue alors qu'elle est une des rares spécialiste, originale, du soprano) ; la tromboniste Janice Robinson (active au sein des orchestres de Thad Jones/Mel Lewis, Clark Terry et Gil Evans, elle co-dirige un quintet avec la corniste Sharon Freeman), Lindsay Cooper (hautbois, basson) ; les guitaristes Emily Remler, Monette Sudler et Leni Stern; les flûtistes Holly Hoffmann et Ali Ryerson ; les percussionnistes Cindy Blackman, Terry Lynne Carrington et Marilyn Mazur. La plupart d'entre elles sont, aujourd'hui encore, en activité.
LA SITUATION AUJOURD'HUI
Il semble (bénéfice de la mise en place, depuis les années 80, de structures de formations nombreuses et efficaces) que le nombre de musiciennes soit enaugmentation et, de plus en plus, sur tous les instruments. Parallèlement, le mouvement vers une plus grande reconnais- sance des strictes qualités créa- tives des musiciennes de jazz se concrétise par une écoute un petit peu moins machiste et un jugement de valeur de plus en plus en lien avec le projet musi- cal proposé. Ce qui devrait d'ail- leurs être la seule règle et non une affaire de sexe (ou de mar- keting). Pas plus que de couleur de peau.
Moyennant quoi, la scène contemporaine du jazz et des musiques improvisées nous offre un nombre conséquent d'instrumentistes de talent dont il serait parfaitement idiot de se priver. Et puis cela présente l'avantage de rompre avec la tendance globalisante actuelle du marché qui cristallise sur une dizaine de noms la repré- sentativité totale du champ du jazz. Osons la diversité, bien plus riche que l'uniformité, la curiosité reste la source la plus sûre du bonheur de la décou- verte (non prescrite).
A écouter donc (liste non exhaustive) : Sophie Agnel, Lynne Aryale, Sylvie Courvoisier, Marilyn Crispell, Sophia Domancich, Bettina Kee, Nathalie Loriers, Perrine Mansuy, Rita Marcotuli, Myra Melford, Amina Claudine Myers, Junko Onishi, Michèle Rosewoman, Renée Rosnes, Ellyn Rucker, Irene Schweizer, Aki Takase, Christine Wodrascka, Rachel Z (piano) ; Myriam Alter, Carine Bonnefoy, Maria Schneider, Magali Souriau, Sylvia Versini (composition, chef d'or- chestres) ; Airelle Besson, Laurie Frink, Ingrid Jensen (trompette) ; Sophie Alour, Lisa Cat-Berro, Claire Daly, Alexandra Grimal, Christine Jensen, Géraldine Laurent, Jessica Lurie, Véronique Magdelenat, Tineke Postma, Maguelonne Vidal (saxophones) ; Regina Carter, Deborah Seffer (violon) ; Irene Aebi, Peggy Lee, Diedre Murray(violoncelle): Dominique Bouzon, Gail Thompson(flûte) ; Loren Mazzacane Connors, Mary Halvorson (gui- tare) ; Hélène Labarrière, Joëlle Léandre, Sarah Murcia, Giulia Valle (contrebasse) ; Béatrice Graf, Susie Ibarra, Sherrie Maricle, Anne Paceo, Micheline Pelzer, Julie Saur y (batterie) ; Hélène Breschand, Isabelle Ollivier (harpe).
Et que les oubliées veuillent bien me pardonner. Comme Jean Ferrat, je proclame avec le poète, que la femme est l'avenir du jazz.
http://www.allumesdujazz.com/Journal/articles/FEMMES_DE_JAZZ_37
lundi 14 novembre 2011
Carla Bleyn, un long métrage sur France Musique
Carla Bley, un long métrage sur France Musique
Lundi 31 Octobre 2011 16:52 Open Jazz
Carla Bley © Alex Dutilh
Début octobre. À quelques kilomètres de Woodstock, deux heures de route au nord de New York. C'est là que vivent Carla Bley et Steve Swallow. Une maison de bois et de verre au milieu du vert et des bois. Le seul frémissement sonore est celui de la brise de midi. L'automne commence à peine à se déguiser en indien.
Avec Catherine Prin-Legall, nous venons interviewer "at home" l'une des très grandes dames du jazz. Pas d'album à sortir, pas de tournée en vue (si ce n'est celle de Steve Swallow en novembre), juste la conviction que c'est à France Musique de faire l'évènement : Carla Bley vient d'avoir 75 ans et il est temps de prendre son œuvre pour ce qu'elle est : l'une des plus emballantes de l'histoire du jazz moderne.
L'égérie des sixties et du jazz libéré, celle qui dirige ses orchestres d'une main de fer depuis bientôt quatre décennies est convaincue qu'elle n'est pas une intellectuelle et qu'elle est incapable d'expliquer sa musique. Pari relevé. Au terme de 2h15 d'entretien ("je n'ai jamais parlé aussi longtemps de ma vie", s'amusera-t-elle en conclusion), elle livre des clés intimes et les ressorts de ses compositions, de son travail d'arrangeuse, de ses doutes de pianiste, de son émerveillement devant des musiques inconnues…
Juste une pause, quand Steve, parfait maître de maison, est descendu nous servir à la mi-temps un spritz à sa façon : moitié blanc sec, moitié eau pétillante. Le ravitaillement en vol a permis de tenir une heure de plus pour fouiller les recoins de la mémoire de Carla où défilait une sacrée galerie de portraits, de Paul Haines à Don Cherry, de Gato Barbieri à Enrico Rava, de George Russell à son père pasteur…
À venir, une semaine complète d'Open Jazz, du lundi 21 au vendredi 25 novembre, conclue par une Nuit Spéciale, dans la soirée du samedi 26 au dimanche 27 novembre, de 1h à 7h du matin. Tout ça réécoutable en streaming les 30 jours suivant la diffusion. Ça va rugir dans le poste !
Avec Catherine Prin-Legall, nous venons interviewer "at home" l'une des très grandes dames du jazz. Pas d'album à sortir, pas de tournée en vue (si ce n'est celle de Steve Swallow en novembre), juste la conviction que c'est à France Musique de faire l'évènement : Carla Bley vient d'avoir 75 ans et il est temps de prendre son œuvre pour ce qu'elle est : l'une des plus emballantes de l'histoire du jazz moderne.
L'égérie des sixties et du jazz libéré, celle qui dirige ses orchestres d'une main de fer depuis bientôt quatre décennies est convaincue qu'elle n'est pas une intellectuelle et qu'elle est incapable d'expliquer sa musique. Pari relevé. Au terme de 2h15 d'entretien ("je n'ai jamais parlé aussi longtemps de ma vie", s'amusera-t-elle en conclusion), elle livre des clés intimes et les ressorts de ses compositions, de son travail d'arrangeuse, de ses doutes de pianiste, de son émerveillement devant des musiques inconnues…
Juste une pause, quand Steve, parfait maître de maison, est descendu nous servir à la mi-temps un spritz à sa façon : moitié blanc sec, moitié eau pétillante. Le ravitaillement en vol a permis de tenir une heure de plus pour fouiller les recoins de la mémoire de Carla où défilait une sacrée galerie de portraits, de Paul Haines à Don Cherry, de Gato Barbieri à Enrico Rava, de George Russell à son père pasteur…
À venir, une semaine complète d'Open Jazz, du lundi 21 au vendredi 25 novembre, conclue par une Nuit Spéciale, dans la soirée du samedi 26 au dimanche 27 novembre, de 1h à 7h du matin. Tout ça réécoutable en streaming les 30 jours suivant la diffusion. Ça va rugir dans le poste !
ils ne m'en veulent pas trop… © Catherine Prin-Legall
plus d'infos
> http://www.wattxtrawatt.com/carlacell.htmPhotos par Frank Bigotte du concert Isabelle Olivier au Vigan
Isabelle Olivier trio invite Mônica Passos et Beñat Achiary
Isabelle Olivier trio invite Mônica Passos et Beñat Achiary dans le cadre de Vagabond Jazz au Vigan (30) le 23 octobre 2011 à l’auditorium du Lycée André Chamson, avec :
Isabelle Olivier (harpe), Mônica Passos (chant), Beñat Achiary (chant), Marc Buronfosse (contrebasse) et Joe Quitzke (batterie).
Isabelle Olivier (harpe), Mônica Passos (chant), Beñat Achiary (chant), Marc Buronfosse (contrebasse) et Joe Quitzke (batterie).
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Reproduction Interdite
par Frank Bigotte
De nouveau des magnifiques photos par Frank Bigotte sur Citizen jazz du concert d'Isabelle Olivier au Vigan
dimanche 13 novembre 2011
Cordes en Scene par Le Jazz est là et Telemac
Série concerts: Cordes en Scene; premier concert le dimanche 20 novembre; voir sur : agenda!! et www.lejazzestla.fr
vendredi 11 novembre 2011
Nouvelles Victoires du Jazz dimanche 13 novembre
| Concerts, émissions avec invités, journées thématiques, FIP crée l'événement et donne ainsi chaque mois un éclairage particulier à une actualité musicale ou un artiste. |
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