Le pianiste John Taylor est mort
Le Monde.fr | • Mis à jour le | Par Sylvain Siclier
Hospitalisé depuis vendredi 17 juillet au CHU d’Angers (Maine-et-Loire), où il avait été admis après un infarctus survenu alors qu’il jouait au festival Saveurs Jazz, à Segré, le pianiste britannique John Taylor est mort samedi 18 juillet.
Né le 25 septembre 1942 à Manchester, John Taylor aura été, tant comme interprète que comme enseignant (Collège de musique de Cologne, York University…), un musicien respecté et loué, personnalité discrète portée par une passion de chaque instant pour la musique. Il avait découvert le jazz dans sa jeunesse, en particulier à l’écoute des pianistes Oscar Peterson (1925-2007) et Bill Evans (1929-1980).
Musicien en partie autodidacte, il s’était installé à Londres au début des années 1960. Il joue d’abord en trio, sans être totalement décidé à abandonner un poste de fonctionnaire. Le déclic se fera lorsqu’il rencontre et joue notamment avec le contrebassiste Dave Holland, le tromboniste Malcolm Griffiths, les saxophonistes John Surman et Alan Skidmore, le trompettiste Harry Beckett (1935-2010)…
Les premières traces phonographiques de John Taylor remontent à 1969, sur les albums de Skidmore (Once Upon a Time) puis de Surman, avec qui il enregistre aussi en grande formation How Many Clouds Can you See ?, publié en 1970. Le jazz britannique est alors en pleine effervescence, en partie sous influence free jazz. Tout en travaillant régulièrement avec Surman et les musiciens dans son orbite ou celle du pianiste Mike Westbrook, John Taylor monte un trio avec le batteur Tony Levin (1940-2011) et le bassiste Chris Laurence.
Il enregistre avec eux son premier album, Pause, and Think Again, qui sort en 1971, auquel participent aussi le trompettiste Kenny Wheeler (1930-2014) et la chanteuse Norma Winstone. Avec Wheeler et Winstone, John Taylor formera à la fin des années 1970 le trio Azimuth, qui durera une vingtaine d’années, enregistrera cinq albums pour le prestigieux label ECM et reste l’une des formations les plus réputées de Taylor.
De l’intime au débridé
Au début des années 1980, il est devenu l’un des musiciens britanniques les plus sollicités sur la scène européenne, pour son travail harmonique, avec des renversements d’accords et des combinaisons inventives, son lyrisme, sa manière de passer de l’intime au plus débridé, son approche percussive du clavier. Il joue et enregistre avec le saxophoniste Jan Garbarek, le trompettiste Enrico Rava, le bassiste Miroslav Vitous, toujours avec Surman et Wheeler, tout en menant ses propres formations, dont Azimuth, écrit des œuvres chorales et des arrangements pour grande formation. Il avait aussi participé au dernier album du groupe Soft Machine, en 1981, alors mené, dans une direction jazz-rock, par le claviériste Karl Jenkins et le batteur John Marshall, avec lequel Taylor avait joué à la fin des années 1960.
Dans les années 1990, il est au sein du trio du batteur Peter Erskine avec le contrebassiste Palle Danielsson (quatre albums, toujours chez ECM), enregistre un sommet de sa discographie Ambleside Days (1992) en duo avec Surman, se produit aussi en solo, même si la forme du trio piano-basse-batterie reste sa préférée en petite formation. Ainsi dans les années 2000, celui avec le contrebassiste Marc Johnson et le batteur Joey Baron puis avec Palle Danielsson et le batteur Martin France (trio particulièrement inspiré dans les albums Angel of the Presence, en 2006, et Whirlpool, en 2007).
En 2012, la BBC avait commandé à John Taylor, pour fêter ses 70 ans, une suite orchestrale consacrée à l’écrivain américain Kurt Vonnegut Jr. (1922-2007). L’un de ses derniers disques avait été l’album Nouvelle Vague (OutNote Records, 2014), au sein du quartette mené par le contrebassiste Stéphane Kerecki (avec qui il avait déjà enregistré en duo en 2011). C’est avec la musique de cet hommage aux compositeurs de films de la Nouvelle Vague et ce quartette que l’on aura entendu, à Segré, les dernières notes de John Taylor.
Chronologie
25 septembre 1942 Naissance à Manchester
1964-1965 Débuts professionnels à Londres
1969 Enregistre avec le saxophoniste John Surman, début d’une longue collaboration
1971 Premier album sous son nom « Pause, and Think Again ». Début d’une autre collaboration régulière, celle avec le trompettiste Kenny Wheeler
1977 Création du trio Azimuth avec Wheeler et la chanteuse Norma Winstone
Depuis les années 1980 Nombreuses formations dont plusieurs trios piano-basse-batterie
18 juillet 2015 Mort à Angers (Maine-et-Loire) après un infarctus lors d’un concert à Segré
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire